Propos recueillis par Jean-Denis Errard
Gestion de Fortune : Pouvez-vous nous présenter vos activités ?
Guillaume Jalenques de Labeau : Mansartis, une entreprise familiale créée en1982, a pour mission d’accompagner ses clients, sur quatre terrains : le conseil patrimonial, le family office, le conseil en M&A et la gestion d’actifs. Nous avons environ 600 millions d’encours en gestion d’actifs. En family office, nous accompagnons une dizaine de familles, des entrepreneurs pour la plupart.
GdF : Comment concevez-vous cette activité de family office ? Tous dans ce métier n’ont pas la même approche !
GJdeL : En ce qui nous concerne cette activité, indépendante des autres, propose une expertise de haut niveau transversale à la fois dans le conseil et entre générations. Le family officer est un chef d’orchestre, il n’y a pas d’impérialisme dans la démarche, nous sommes une interface qui se substitue au client vis-à-vis des prestataires extérieurs. Au-delà de la mission de conseil, notre rôle est de faire gagner du temps au client en rassemblant les données et documents nécessaires, en mettant en forme les hypothèses en organisant les appels d’offres et les rendez-vous patrimoniaux, tout cela afin que le client n’ait plus qu’à prendre la décision finale en connaissance de cause. Le périmètre de la mission est différent pour chaque client. C’est un métier où nous ne pouvons pas chercher à faire des économies d’échelle. Nous sommes dans le sur-mesure, nous ne cherchons pas à industrialiser le savoir-faire.
GdF :Oui mais vous avez internalisé certaines compétences ? Vous n’avez pas un problème de conflit d’intérêt par exemple avec votre activité d’asset management ?
GJdeL : Par rapport à la gestion d’actifs, vous avez raison, il convient de poser des garde-fous pour éviter les conflits d’intérêts. En ce qui nous concerne, la règle est claire, nous nous excluons a-priori des appels d’offres. Cela dit, le client, du fait de la relation de confiance qu’il a avec nous, peut nous demander de gérer tout ou partie de ses avoirs. Dans le domaine du conseil patrimonial, par exemple en fiscalité, nous pouvons avoir des différences de vue entre nos compétences internes et celles de l’intervenant extérieur. C’est une question de confrontation de positons, pas de conflit d’intérêts.
GdF : Quel type de gestion proposez-vous ?
GJdeL : Une gestion long only, en architecture fermée, et surtout pas benchmarkée, donc avec un tracking error qui peut être important. Nous tenons à cette gestion de conviction. Ce qui fait que nous sommes concentrés sur une trentaine, une cinquantaine au plus, de valeurs par zone géographique. En outre, nous insérons dans nos fonds diversifiés une poche d’obligations, de type investment grade, et plutôt de duration courte, comme limitateur de volatilité. Pour ce qui est de l’allocation d’actifs, nous voyons cela avec le client selon ses objectifs.
GdF :C’est-à-dire ? Comment évoquez-vous ce sujet du risque avec le client ?
GJdeL : En rappelant deux vérités de base : 1) le niveau de rendement est lié au niveau de risque qu’on accepte de prendre. Et 2) quand on a un horizon de long terme on peut supporter de la volatilité passagère. Quelle que soit la conjoncture, un investissement en actions est le plus souvent gagnant après 10 ans. La déclinaison de ces principes est souvent du marketing.
GdF : Vous pensez que la gestion structurée a du sens ?
GJdeL : Peu si votre client a une optique de long terme et oui si c’est pour améliorer les performances d’une réserve de trésorerie permanente. Je rappelle que des taux assez élevés et une volatilité forte sont des conditions favorables pour créer de tels produits. Cela reste des produits chers dont les coupons sont aléatoires. Se protéger contre les variations de la bourse quand on a une optique à 10 ans est le plus souvent inutile. La conjoncture actuelle a l’avantage de réapprendre aux investisseurs à apprivoiser le risque actions.
GdF :L' assurance vie en euros, vous pensez que c’est un placement toujours solide ? Vous comprenez ceux qui partent au Luxembourg ?
GJdeL : Bien sûr que c’est solide. Maintenant je pense que les niveaux de rémunération sont trop décorrélés des conditions de marché. Cela dit, je conserve ma confiance aux compagnies avec lesquelles nous sommes en relation. Le risque de faillite est exagéré, si un tel scénario devait se produire, on aurait des questions autrement plus graves à résoudre avant, sur la qualité des actifs financiers.
Quant à souscrire une assurance vie au Luxembourg, oui pour nos clients expatriés ou mobiles. Sinon il n’y a pas de raison unique. La sécurité des dépôts par exemple n’est pas un motif suffisant. Beaucoup d’autres facteurs interviennent.
GdF : L' immobilier est-il globalement sain ou surcoté ?
GJdeL : Surcoté pour l’immobilier des grandes villes. Quand on a des taux aussi bas, quasi nuls, et des prix qui n’arrêtent pas de monter, vous comprenez bien que cette classe d’actifs connaît une bulle. C’est vrai que depuis 2000 l’immobilier a permis d’excellentes rentabilités, mais…
GdF : Ce n’est plus le cas ?
GJdeL : Je ne dirais pas cela. C’est une question de temps ! Si vous investissez pour du long terme, vous n’avez plus cette inquiétude de savoir si vous avez acheté cher ou pas. Si les prix étaient affichés tous les jours comme en bourse, les investisseurs auraient davantage conscience des fluctuations ! Beaucoup de fortunes se sont construites par le passé en misant sur l’immobilier et en activant le levier du crédit. Aujourd’hui les charges notamment fiscales sont lourdes et les perspectives plus incertaines.
GdF : L’art, vous conseillez d’investir ?
GJdL : Nous n’avons pas d’expertise sur le marché de l’art.
GdF :Quels sont les vecteurs les plus rentables potentiellement ?
GJdL : Là encore, un principe de base pour nous : l’entreprise est la seule source de création de valeur. Donc nous recommandons de privilégier la part des actions, cotées ou non.
GdF : Vous constatez quelle évolution sur les expatriations fiscales ?
GJdL : Les expatriations sont en hausse, c’est vrai, mais difficile de dire que c’est lié uniquement à une question fiscale. Beaucoup de jeunes, notamment des entrepreneurs, artistes, sportifs, partent parce qu’ils pensent trouver surtout des conditions économiques plus dynamiques pour se lancer. La question est de savoir s’ils vont revenir un jour…
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